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  • Photo du rédacteurGuillaume PelletBourgeois

5 stratégies pour sortir la tête de l’eau



« L’ancien rugbyman, demi de mêlée et fan de Galthié, carre son 1,75 m pour 80kg, pectoraux vivaces et cuissots solides, dans un fauteuil jaune citron. Il raconte joliment entre anecdotes et humour. Il analyse pertinemment et relativise avec sagacité, en marin et en technicien. Jamais on ne sent monter la déprime ou l’angoisse » (Kévin Escoffier, coulé, touchant, Libération, 14/12/20, Article L. Le Vaillant).


Kevin Escoffier est-il un surhomme ? Comment a-t-il fait pour ne pas craquer quand il s’est retrouvé seul dans son canot de sauvetage dans les 40e rugissants, dans la nuit noire, à des milliers de kilomètres des premiers secours ? Et si, à 14h46, juste après son message d’alerte, sa seule véritable chance était…. son cerveau ?


« Pourquoi attendre d’être mal pour demander à son cerveau d’aller bien ? »

Quand tout va de travers, quand tu es au fond du trou, c’est « LE » moment où ton mental devient la pièce maîtresse. C’est dans les moments de doute, d’échec, de honte, que l’on voit vraiment les ressources de chacun.

Rien de génétique ou de magique là-dedans… mais plutôt une habitude et un entraînement pour ne pas sombrer quand tu es en difficulté.

Quand je débute un accompagnement, j’aime bien rappeler cette petite phrase : pourquoi attendre d'être mal pour demander à ton cerveau d'aller bien ?

La clé est dans l’anticipation et notre faculté à aborder les difficultés avec le bon état d’esprit.



Réussir à prendre de la distance avec ses pensées et émotions négatives


En préparation mentale, la régulation des émotions désagréables est un défi souvent difficile à relever.

Il est de mise d’entendre qu’un échec est formateur, qu’une erreur sert de leçon, que le vrai champion sait perdre… mais dans les faits, je ressens colère, frustration, honte ou encore déception. Et il n’est jamais facile de faire face.

Dans ces moments, il est coutume d’entendre dire : « Passe à autre chose », « Ne sois pas déçu », etc…

Mais en agissant de la sorte, l’entourage m’encourage à minimiser, ignorer, voire à supprimer ce type d’émotions.

C’est un piège émotionnel fréquent dans lequel tombe de nombreuses personnes. Car en n’acceptant pas de ressentir ces émotions désagréables, je ne fais que les renforcer.

C’est ce que Daniel Wegner a formalisé sous le concept d’effet rebond (Ironic processes of mental control) et qui montre que plus on s’interdit des pensées indésirables, plus notre cerveau s’en souvient. En fait, lorsque nous essayons de ne pas penser à quelque chose (une pensée, une émotion), une partie de notre cerveau évite la pensée interdite, mais une autre partie "vérifie" de temps en temps pour s'assurer que la pensée ne revient pas. Par conséquent, ironiquement, notre cerveau nous rappelle cette pensée indésirable.

Le problème, c’est qu’en fonctionnant de la sorte, je vais m’identifier à mes pensées négatives et je ne réussirai pas à prendre de la distance lorsqu’elles me feront souffrir.



LES MODES DE PENSÉE A ÉVITER




Prenons l’exemple du naufrage de Kevin Escoffier pour identifier les 4 modes de pensée à éviter durant les 12h, seul, dans son canot de sauvetage





Mode de pensée #1 : Tout voir en noir

« Je ne peux pas arrêter de penser aux conséquences néfastes de cette voie d’eau dans mon bateau »


Mode de pensée #2 : Accuser

« Les ingénieurs ont fait de la m… Comment ont-ils pu faire cette erreur ? »


Mode de pensée #3 : Ruminer

« Ce naufrage me rappelle la déception que j’ai ressenti à la dernière course, la Vendée-Arctique-Les Sables d’Olonnes »


Mode de pensée #4 : Se faire des reproches à soi-même

« Je suis pleinement coupable de ce qui arrive, j’aurais dû diminuer la voilure et aller moins vite »


En adoptant un de ces 4 modes de pensées, Kevin Escoffier aurait eu tendance à rester hameçonné aux émotions désagréables (tristesse, honte, peur, colère…). Il aurait eu ainsi moins de ressources disponibles pour chercher activement à surmonter ces sentiments négatifs et à agir efficacement.

Alors comment faire pour sortir la tête de l’eau après un échec, une mauvaise performance ou un naufrage ?



5 STRATÉGIES EFFICACES


Je te propose d’utiliser des stratégies de réévaluation cognitive « adaptative », c’est-à-dire qui permettent de réguler efficacement une émotion désagréable.

Le principe est de considérer que les pensées ne sont que des pensées et nous possédons le pouvoir de les modifier.


Il s’agit d’explorer différents points de vue et d’approfondir celui qui nous paraît le plus favorable. Cette nouvelle évaluation aura un effet indirect mais réel sur nos émotions, notre imagination et nos associations d’idées. L’apprentissage de ces stratégies permet d’anticiper les réactions émotionnelles trop violentes. Cette démarche est validée par de nombreuses études en psychothérapie.


En cas d’échec, pour faire face à ce flot impressionnant d’émotions, je dois être en mesure d’utiliser un "mix" de ces 5 stratégies de réévaluation cognitive. Je dois avoir étoffé et développé ma palette de stratégies pour rebondir et sortir la tête de l’eau le plus rapidement possible.




Stratégie : Relativiser

Il s’agit de relativiser un échec en le mettant en parallèle ou en le comparant avec d’autres incidents/évènements dans l’optique « ça aurait pu être nettement pire... le bateau a coulé mais je suis en sécurité dans mon canot avec ma combinaison de survie » ou « Ok, je suis mal barré mais j’ai fait 100% de ma check-list « survie » (canot, combinaison, balise…). Je dois essayer de repérer les éléments positifs de la situation et non grossir le trait sur le négatif.


Stratégie : Acceptation (ou résignation)

Il s’agit d‘accepter l’état présent ou ce qui est arrivé dans l’optique « je dois accepter que les choses se soient passées ainsi : ce qui est fait est fait ! » Je dois essayer de ne pas refaire le film des évènements. Il est impossible de revenir en arrière et il est primordial d’accepter le côté immuable de ce qui s’est passé. Un échec n’est pas jamais agréable mais c’est toujours le point de départ d’un autre cycle de travail.


Stratégie : Distraction

Il s’agit de se concentrer et se focaliser sur des pensées positives, réjouissantes, gaies et agréables, au lieu de ruminer et de se miner l’esprit avec des expériences vécues « je me focalise sur des pensées positives : mes proches, un endroit que j'adore... ». Je peux aussi essayer de changer de sujet, de tourner en dérision l’échec, de faire une activité ludique pour faire autre chose.


Stratégie : Réévaluation

Il s’agit de reconnaître ce que l’on peut retirer de positif de l’échec, notamment en termes de développement personnel dans l’optique « je pense pouvoir retirer quelque chose de ce qui est arrivé, par exemple, changer ma façon de naviguer dans une houle de 5m avec un vent de 30 nœuds ». Je dois essayer d’utiliser l’échec pour le transformer en « leçons ». Chaque échec peut devenir une source d’apprentissage et je peux valoriser ma progression en termes d’expérience et de vécu.


Stratégie : Se projeter en avant

Il s’agit de saisir ce qui est survenu et d’identifier d’autre solutions dans l’optique « je me concentre à présent sur ce que je peux faire ici et maintenant : ne pas dormir, écoper l’eau du canot, scruter l’horizon… ». Je dois essayer de m’orienter vers le présent et transformer la situation en objectifs clairs, concrets et atteignables. Cette stratégie est très utile pour passer de la pensée en boucle à l’action.




Pour mettre en place ces stratégies, le travail que je propose en préparation mentale consiste à utiliser des stratégies de coping (aussi appelées stratégies d’ajustement) afin d’identifier au plus vite une pensée négative et apprendre à y répondre efficacement. Lazarus et Folkman (1984) définissent le coping comme « l’ensemble des efforts cognitifs et comportementaux destinés à maîtriser, réduire ou tolérer les exigences internes ou externes qui menacent ou dépassent les ressources d’un individu ».



Mais pour certaines personnes, le stress, l’anxiété, voire l’angoisse ou la panique peuvent survenir dans ces moments compliqués.


Si je réagis émotionnellement de façon intense, il est alors préférable de ne pas mettre en place tout de suite ces stratégies de réévaluation cognitive.


L’utilisation d’exercices de régulation émotionnelle est à envisager préalablement pour aider à ramener un peu de calme (par exemple avec la cohérence cardiaque, la pleine conscience, l’imagerie mentale…). Voir aussi mon article 3 outils pour être lucide en situation d'urgence




LE "BON" ÉTAT D’ESPRIT


Pour conclure, il est bon de rappeler que l'engagement dans l'action reste la stratégie la plus efficace (et aussi la plus utile pour la survie) mais qu’y adjoindre une stratégie de réévaluation cognitive « adaptative » est un plus non négligeable. Avoir un mental de champion n’est pas inné mais peut s’apprendre.


Les travaux en psychologie sociale de Carole Dweck (Mindset : the new psycholohy of success) ont ainsi montré qu’adopter un état d’esprit de développement permet d’être beaucoup plus performant. Il s’agit de voir en chaque erreur, obstacle ou échec une opportunité d’apprentissage. Le plus important est de tirer des leçons et d’apprendre de ses échecs.

Cette thèse est confortée par le modèle de Jeremie Jamieson, qui montre que pour faire face au stress inhérent à la vie actuelle, savoir réévaluer ses émotions négatives et adopter un bon « mindset » est la clé de la progression.


Enfin, c’est par la prise en compte de mes émotions que je peux sortir plus facilement la tête de l’eau. Dans les moments difficiles, réguler ses émotions pour prendre la meilleure décision est un incontournable qui se joue en 2 étapes. 1. Identifier et nommer ses émotions. 2. Accepter ses émotions et lâcher-prise.



J’espère que vous aurez trouvé dans cet article des axes de travail et des conseils pour sortir la tête de l’eau, mais surtout rebondir et digérer un échec.

Vous avez des questions ? Posez-les en commentaire de l’article.


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Je remercie Jean-Christophe Thibaut qui m’a inspiré cet article ainsi que Bernard Anselem pour ces commentaires toujours éclairants.


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